La loi n°2018-771 du 5 septembre 2018, intitulée « Loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a réformé divers sujets intéressant les entreprises, dont le détachement de travailleurs et le travail illégal.

Les modifications apportées s’inscrivent dans deux axes majeurs : d’une part, rendre le détachement plus simple en assouplissant les obligations des employeurs utilisant ce mécanisme, et d’autre part, renforcer la protection des travailleurs détachés en réprimant plus sévèrement les employeurs ne respectant pas ces obligations.

 

Un assouplissement des formalités relatives au détachement

Premièrement, le législateur a supprimé l’article L.1262-4-6 du Code du travail qui prévoyait que l’employeur était tenu d’une contribution forfaitaire lors de la déclaration de détachement en ligne (bien que cette disposition n’ait jamais été mise en œuvre).

Ensuite, l’employeur est dispensé de déclarer préalablement le détachement et de désigner un représentant en France dans certains cas :

  • Lorsqu’il s’agit de détachement de courte durée ou d’évènements ponctuels (cela ne concerne toutefois que certaines activités listées par décret) (C. trav., art. L.1262-6).
  • Lorsque l’employeur détache un salarié pour son compte propre.
  • En cas de détachements récurrents. Dans ce dernier cas, la dispense n’est pas automatique : l’employeur doit solliciter l’administration et prouver qu’il respecte les dispositions législatives et conventionnelles pour pouvoir en bénéficier (C. trav., L.1263-8).

 

Une répression plus sévère en cas de fraude au détachement

La loi « avenir professionnel » s’est employée à accroître la protection des travailleurs détachés de plusieurs manières :

Tout d’abord, la définition du travailleur détaché, prévue à l’article L.1261-3 du Code du travail, est précisée (« travaillant habituellement pour le compte de [l’employeur] hors du territoire national ») afin d’empêcher des employeurs établis hors de France d’utiliser le détachement pour des salariés exerçant habituellement leur activité en France.

Ensuite, les sanctions en cas de fraude au détachement sont doublées. Un employeur devra désormais s’acquitter d’une amende de 4 000 euros par salarié détaché (contre 2 000 euros auparavant) et d’une amende de 8 000 euros s’il récidive (contre 4 000 euros). Le délai de récidive passe également d’un an à deux ans (C. trav., art. L.1264-3).

A défaut de paiement, il sera désormais possible pour la Direccte d’interdire le détachement pendant une durée de deux mois renouvelable. De plus, si l’employeur ne se soumet pas à cette interdiction, c’est à une amende pouvant aller jusqu’à 10 000 euros par salarié détaché à laquelle il s’expose (C. trav., art. L. 1263-6).

En outre, l’employeur contestant ces amendes administratives ne se verra plus bénéficier du caractère suspensif de ce recours et devra donc s’acquitter des sommes quoi qu’il arrive (C. trav., art. L.1263-6).

Le paiement de ces amendes fait désormais partie du champ de l’obligation de vigilance du donneur d’ordre. Ce-dernier devra s’assurer, lorsqu’il conclura un contrat de prestation de service internationale, que les sommes dues ont été payées par l’employeur (C. trav., art. L.1262-4-1).

Enfin, la fraude à l’établissement (utilisation abusive des dispositions applicables au détachement) est désormais considérée comme du travail dissimulé par dissimulation d’activité (C. trav., art. L.8221-3).

La loi « avenir professionnel » renforce également la lutte contre le travail illégal en ouvrant un droit de communication général à l’inspection du travail qui pourra désormais obtenir tout document quel que soit son support, y compris auprès des « tiers » non mis en cause, sans se voir opposer le secret professionnel (C. trav., L.8113-5-1 et -2).

En cas de travail illégal, la sanction de cessation d’activité d’un site, autrefois réservée aux chantiers de bâtiment ou travaux publics, est désormais étendue à tout lieu autre que le siège de l’entreprise ou l’un de ses établissements (C. trav., art. L.8272-2).

Enfin, toute condamnation pour travail illégal commis en bande organisée, ou commis à l’égard d’un mineur soumis à l’obligation scolaire ou d’une personne dont l’état de vulnérabilité ou dépendance sont apparents ou connus de l’auteur, sera obligatoirement accompagnée de l’affichage sur « liste noire » (sauf décision spécialement motivée du juge) (C. trav., L.8224-5).

 

Jean-Marc Albiol, Associé et Charlotte Biscotti, juriste


Pour aller plus loin

Vous souhaitez recevoir nos newsletters, informations et actualités ?

Inscrivez-vous ici