Cass. soc., 14 févr. 2024, n° 22-21.464 , F-D
Aux termes de l’article L. 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 relatifs au harcèlement moral, est nulle. D’autre part, l’article L.1152-4 du même code prévoit que « l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral. »
Concernant cette dernière disposition, par un arrêt du 14 février 2024, la Cour de cassation précise que le manquement de l’employeur à son obligation de prévention des agissements de harcèlement moral n’est pas en soi de nature à entrainer la nullité du licenciement.
Dans la présente affaire, une salariée embauchée en qualité d’infirmière diplômée d’Etat a été licenciée pour cause réelle et sérieuse. Elle saisit le conseil de prud’hommes afin de contester la rupture, soutenant notamment avoir été victime de harcèlement moral. Elle sollicite une indemnisation sur ce fondement ainsi que sur celui du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, en ce qu’il n’aurait pas pris les mesures nécessaires en vue de prévenir tout agissement de harcèlement moral. Sur ce fondement, la salariée a demandé à la juridiction prud’homale la requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement nul.
Le juge du fond prononce la nullité du licenciement, affirmant que la salariée apporte effectivement la preuve du harcèlement moral.
Selon la cour d’appel, le harcèlement moral était directement lié aux des déficiences repérées et non traitées par l’employeur dans l’organisation générale de l’entreprise et son pouvoir de direction.
L’employeur a formé un pourvoi en cassation.
Concernant la qualification de harcèlement, la Cour de cassation considère que la cour d’appel a souverainement statué sur les éléments de preuve dont elle disposait pour en déduire l’existence d’une situation de harcèlement, tandis que de son côté, l’employeur n’a pas apporté d’éléments objectifs de nature à écarter cette qualification. Elle confirme donc la qualification de harcèlement moral.
Sur la nullité du licenciement, l’arrêt d’appel est censuré au visa des articles
L.1152-3 et L.1152-4 du code du travail en retenant que : « le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité ou à l’obligation de prévention du harcèlement moral instituée par l’article L. 1152-4 du code du travail n’est pas de nature à justifier la nullité du
licenciement ».
Par cette position, la Haute Juridiction retient que la nullité du licenciement ne peut être déduite du seul fait que l’employeur n’a pas pris toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral. La chambre sociale procède ainsi à une interprétation stricte de l’article L.1152-3 qui sanctionne la rupture du contrat par la nullité en ce qui concerne seulement la rupture intervenue en violation des articles L.1152-1 et L.1152-2 du code du travail.