Cass. soc., 15 mai 2024, n°22-21.109

Un salarié a été engagé en qualité de responsable export par contrat de travail de droit français. Il a ensuite été expatrié pour exercer les fonctions de directeur chargé du développement commercial et industriel de la filiale mexicaine. Durant son expatriation, son contrat de travail de droit français n’était pas rompu.

Par la suite, le salarié a été licencié par la société française pour faute grave.

Il saisit alors le conseil de prud’hommes afin de contester son licenciement, et solliciter le paiement des primes d’intéressement et de participation mis en place au sein de son employeur société française ainsi que la remise de bulletins de paie relatifs à sa rémunération dans cette entreprise.

En appel, la Cour le déboute de :

  • ses demandes de versement des primes d’intéressement et de participation, considérant que le salarié expatrié avait cessé d’appartenir à l’effectif de son employeur société française au profit de la filiale étrangère au sein de laquelle il était expatrié ;
  • sa demande de remise de bulletins de paie au motif qu’il ne relevait plus de la sécurité sociale française depuis son expatriation et que les sommes qui lui étaient versées par son employeur société française n’étaient pas soumises aux cotisations de sécurité sociale française, de sorte qu’elle n’était donc pas tenue d’établir un bulletin de paie de droit français.

Le salarié forme alors un pourvoi en cassation.

La Chambre sociale de la Cour de cassation fait droit à l’ensemble de ses demandes relatives à l’épargne salarié et au bulletin de paie.

S’agissant de l’intéressement et de la participation, elle casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel au visa de l’article L. 3342-1 du Code du travail, selon lequel tous les salariés d’une entreprise compris dans le champ des accords d’intéressement et de participation bénéficiant de leurs dispositions. Dès lors, l’ensemble de ces salariés doit pouvoir bénéficier de la répartition des résultats de l’entreprise. La Cour de cassation rappelle que la clause d’un accord d’intéressement ou de participation excluant les salariés détachés à l’étranger ou expatriés est réputée non écrite.

Ainsi, le salarié n’ayant jamais cessé d’appartenir à l’effectif de la société française durant sa période d’expatriation auprès de la filiale mexicaine, il était en droit de bénéficier des primes d’intéressement et de participation versées en application de ces accords.

S’agissant du bulletin de paie, la Cour de cassation juge au visa des articles L. 3243-1 et L. 3243-2, alinéa 1 du Code du travail que lors du paiement du salaire, l’employeur remet à tous les salariés travaillant en quelque lieu que ce soit pour un ou plusieurs employeurs, un bulletin de paie. En l’espèce, l’employeur société française avait versé au salarié une partie de sa rémunération durant son expatriation, de sorte qu’il était tenu de lui remettre des bulletins de paie à ce titre, peu important que le salarié ne soit pas affilié à la sécurité sociale française.

En conséquence, par ce présent arrêt, la Cour de cassation rappelle sa jurisprudence constante s’agissant de l’impossibilité pour les employeurs d’exclure du bénéfice de l’épargne salariale les salariés expatriés à l’étranger (Cass. soc., 28 nov. 2006, nº 04-19.623 ; Cass. soc., 6 juin 2018, nº 17-14.372). Elle apporte également une nouvelle précision, à savoir l’obligation pour les employeurs de remettre un bulletin de paie aux salariés expatriés, dès lors qu’ils leur versent une partie de leur rémunération durant l’expatriation, peu important que ces derniers ne soient pas affiliés au régime général de sécurité sociale française.


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