Le comité social et économique d’une entreprise avait décidé de recourir à une expertise, afin de l’assister lors des consultations annuelles sur la situation économique et financière de la société et sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi. L’expert désigné à cet effet avait notifié à la société une lettre de mission portant sur les modalités de son intervention, qui fixait notamment un coût prévisionnel prenant en compte des temps d’entretiens avec les salariés de la société.
La société a fait assigner le comité et l’expert devant le président du tribunal judiciaire aux fins de réduire le taux journalier et le coût prévisionnel de l’expertise ainsi que la durée de celui-ci. Le tribunal a fait droit aux demandes de la société, en considérant notamment que l’expert ne peut conduire des entretiens avec les membres du personnel qu’avec l’accord de la direction. Le tribunal considérait dès lors qu’il ne pouvait être fait injonction à la société de lui permettre de conduire de tels entretiens, de sorte que les jours prévus à cet effet devaient être retranchés du coût prévisionnel de l’expertise.
L’expert-comptable s’est pourvu en cassation à la suite de cette première décision.
Selon le demandeur au pourvoi, l’expert a libre accès à l’entreprise pour les besoins de sa mission et détermine seul les éléments qu’il estime utiles à l’exercice de cette mission. Il peut dès lors, dans le cadre de l’analyse de la politique sociale, de l’emploi et des conditions de travail, exiger de réaliser des entretiens avec les salariés.
La Cour valide la position retenue par le tribunal judiciaire et rejette le pourvoi. Selon elle, l’expert-comptable, désigné dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, s’il considère que l’audition de certains salariés de l’entreprise est utile à l’accomplissement de sa mission, ne peut y procéder qu’à la condition d’obtenir l’accord exprès de l’employeur et des salariés concernés. L’employeur s’étant opposé à ces entretiens, le président du tribunal en a exactement déduit que devait être rejetée la demande de l’expert-comptable tendant à faire injonction à l’employeur de lui permettre de conduire lesdits entretiens de sorte que le nombre de jours prévus pour l’expertise devait être réduit.
La Cour confirme ainsi la position adoptée dans une ancienne décision du tribunal de grande instance de Paris (TGI Paris 30 juillet 1984 n° 84-7714 Comité central d’entreprise de la librairie larousse c/ La bouret et a.), qui avait retenu que « la mission [de l’expert] ne peut, en l’état des textes et de la volonté du législateur, comporter des pouvoirs d’audition ou d’interrogatoire du personnel ».