Cass. soc., 26 juin 2024, n°23-15.498

Le plan de départ volontaire mis en place par l’employeur dans le cadre d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi est une alternative aux licenciements économiques, offrant aux salariés la possibilité de quitter l’entreprise volontairement en échange d’avantages financiers.

Par une série d’arrêts rendus le 26 juin 2024, la chambre sociale de la Cour de cassation a pu se prononcer sur le point de savoir dans quelle mesure les salariés signataires d’un accord de rupture amiable, ayant donc bénéficié du plan de départ volontaire, conforme aux prévisions d’un plan de sauvegarde de l’emploi peuvent en contester le motif économique.

En l’espèce, une société, filiale d’un groupe, exerce une activité de recherche et développement en dermatologie. En 2017, dans le cadre d’un projet de réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde sa compétitivité, le groupe avait présenté au comité d’entreprise un document d’information sur le projet de reconversion / fermeture du site. Par la suite, la société avait soumis à la DIRECCTE un document unilatéral portant sur le projet de licenciement collectif incluant PSE mixte, assorti d’un plan de départs volontaires, lequel avait été homologué le 11 avril 2018. Entre août et septembre 2018, des salariés non-cadres de la société avaient signé une convention de rupture amiable pour motif économique.

Contestant le motif économique de la rupture, les salariés signataires de l’accord ont formé un recours devant la juridiction prud’homale afin d’obtenir l’indemnisation de divers préjudices.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence, par un arrêt du 10 mars 2023 a déclaré les salariés recevables à contester le motif économique de la rupture, et condamné l’employeur à payer à chacun des salariés des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Les juges du fond avaient ainsi retenu que la convention de rupture amiable entrant dans le dispositif applicable aux licenciements pour motif économique, l’employeur devait établir l’existence d’un motif économique licite, si bien que les salariés étaient recevables à contester le motif économique de la rupture.

L’employeur se pourvoit en cassation. Il fait grief à l’arrêt de déclarer les salariés recevables en leurs contestations du protocole de rupture amiable et du motif de rupture du contrat de travail, ainsi que de le condamner à leur verser des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il fait valoir que lorsque la rupture d’un contrat de travail pour motif économique résulte d’un accord de rupture amiable conforme aux prévisions d’un accord collectif ou d’un PSE soumis aux représentants du personnel, la cause économique de la rupture ne peut être contestée, sauf fraude ou vice du consentement.

La question posée à la Cour de cassation était donc celle de savoir si la contestation du motif économique de la rupture par les salariés signataires d’un accord de rupture amiable conforme aux prévisions d’un PSE était recevable.

Par son arrêt du 26 juin 2024, au visa des articles 1101, 1103 du code civil relatifs à la force obligatoire des contrats, et L. 1221-1 et L. 1221-3 du Code du travail relatifs au motif économique, la chambre sociale de la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence. Les Hauts Juges constatent que la rupture intervenue par accord amiable résultant d’un plan de départs volontaires dans le cadre de de la mise en œuvre d’un PSE, soumis aux représentants du personnel ne peut être contestée sauf fraude ou vice du consentement. Cette solution est en accord avec la jurisprudence constante de la Cour de cassation concernant la rupture conventionnelle et le plan de départ volontaire (Cass. soc., 8 février 2012, nº 10-27.176 ; Cass. soc., 17 décembre 2014, nº 13-19.623).

Par ailleurs, le même jour, la chambre sociale a constaté que le juge judiciaire est incompétent pour apprécier le motif économique et la rupture amiable des représentants du personnel autorisée par l’inspection du travail (Cass. Soc. 26 juin 2024, n°23-15.533), réaffirmant le principe de la séparation des pouvoirs.


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