Cass. soc., 29 mai 2024, n°22-23.415
Un employeur et un syndicat ont signé, le 27 octobre 2006, un accord d’entreprise qui a permis aux salariés de bénéficier de garanties complémentaire « frais de santé », semble-t-il à adhésion obligatoire. Le 4 décembre 2006, un accord complémentaire d’entreprise a été signé prévoyant le cofinancement du régime frais de santé par le comité central d’entreprise. Rappelons que depuis le 1er janvier 2005 :
- Le financement par le comité d’entreprise de garanties de protection sociale complémentaire, est assimilé à une contribution patronale et bénéficie donc de l’exonération de cotisations sociales prévue par l’article L.242-1 4° II du Code de la sécurité sociale.
- Ces exonérations sont soumises à des conditions strictes. Notamment, les garanties doivent présenter un caractère collectif et obligatoire, et faire l’objet d’un acte juridique en bonne et due forme en application de l’article L.911-1 du Code de la sécurité sociale (convention ou accord d’entreprise, accord par referendum ou décision unilatérale de l’employeur).
Quelques années plus tard, des négociations ont été engagées afin de réviser les modalités de ce régime, compte tenu de l’obligation de mettre en place une couverture santé collective à compter du 1er janvier 2016 (instaurée par la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi et à la généralisation de la complémentaire santé).
Ces négociations n’ayant pas abouti, l’employeur a pris une décision unilatérale, le 18 décembre 2015, pour adapter les garanties frais de santé, fixer les nouvelles contributions ainsi que leur répartition entre l’employeur et les salariés, tenant compte de la participation du Comité d’entreprise fixée par l’accord du 4 décembre 2006.
Le comité central d’entreprise et les représentants syndicaux ont alors contesté devant le tribunal judiciaire la répartition des cotisations résultant de cette décision unilatérale, notamment en ce qu’elle maintenait les dispositions de l’accord du 4 décembre 2006 sur le cofinancement par le comité central d’entreprise ; ce dernier ayant selon eux été rendu caduc, l’accord du 27 octobre 2006 ayant été implicitement dénoncé par la décision unilatérale de l’employeur.
La Cour d’appel de Poitiers adopte cette analyse,et donne raison au comité central d’entreprise. .
Un pourvoi est formé par l’employeur contre cette décision.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel en posant le principe selon lequel la dénonciation d’un accord collectif ne peut être implicite. Elle juge ainsi que « la modification par voie de décision unilatérale de l’employeur, après l’échec des négociations collectives, d’un régime d’assurance complémentaire frais de santé , instauré par voie d’accord collectif, rendues nécessaires par la mise en conformité avec des dispositions législatives et conventionnelles nouvelles, ne prive pas de cause et ne rend pas dès lors caduc un accord collectif antérieur relatif au cofinancement par les institutions représentatives du personnel de ce régime complémentaire au titre des activités sociales et culturelles ».
Un accord d’entreprise instaurant un régime de protection sociale complémentaire ne saurait dès lors déroger aux règles de droit commun relatives à la dénonciation des accords collectifs.