Cour de cassation, Chambre sociale, 10 septembre 2025, n° 23-14.455

Le 10 septembre 2025, la chambre sociale de la Cour de cassation a rendu une décision relatives du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

Dans cette affaire, trois salariés assujettis à un forfait en heures de 38,5 heures par semaine, dans la limite de 219 jours de travail par an (modalité syntec n°2) ont saisi la juridiction prudhommale pour :

  • Contester le régime de temps de travail, les conditions de la convention collective n’étant pas réunies, afin de faire décompter leur durée du travail sur la semaine ; et, en conséquence,
  • Se voir en conséquence verser des rappels d’heures supplémentaires correspondant à la différence entre le seuil de déclencher de 35 heures et les 38,5 heures prévues en application de leur horaire de travail.

La Cour d’appel fait droit aux demandes de rappel des salariés, mais, conformément à la position historique de la Cour de cassation en ne comparant au seuil de 35 heures que le temps de travail effectif, et donc en déduisant du temps de travail effectif considéré les jours de congés payés et de RTT pris, qui ont eu pour effet de limiter le nombre d’heures supplémentaires retenues pour les semaines incomplètes.

Les salariés forment un pourvoi en cassation en estimant que les jours de congés payés devraient être considérées comme du travail effectif au regard du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

La question posée à la Cour de cassation était donc celle de savoir si les jours de congés payés devaient être pris en compte dans le calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires hebdomadaires effectuées par un salarié.

La Cour de cassation répond par la positive. Opérant un revirement de jurisprudence, elle se fonde sur la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne qui fait du droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l’Union.

Or, la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) en a conclu que toute pratique ou omission d’un employeur ayant un effet potentiellement dissuasif sur la prise du congé annuel par un travailleur est également incompatible avec la finalité du droit au congé annuel payé et qu’un salarié ne peut pas subir un désavantage financier du fait de la prise de congés payés – comme par exemple le fait qu’un salarié ne se voie pas maintenir des commissions pendant une période de congés (CJUE, 22 mai 2014, Lock, C-539/12).

La Cour de cassation en extrapolant la décision du 22 mai 2014 conclut qu’un salarié se verrait « dissuadé » de prendre des jours de congés payés si cela conduisait à l’empêcher de bénéficier d’heures supplémentaires, du fait du maintien à 35 heures du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

La Cour de cassation, interprétant la législation de manière à en assurer la conformité avec le droit communautaire, en conclut que le seuil des heures supplémentaires devrait être abaissé lorsqu’un salarié prend des jours de congés payés pendant une semaine.

Cependant, la Cour de cassation n’indique pas que le même raisonnement s’applique aux autres jours de repos, de telle sorte que la déduction des heures non travaillés du faite de la prise par un salarié de RTT pourrait être encore admise par les juridictions. Par ailleurs, la Cour de cassation n’indique pas expressément que son raisonnement s’appliquerait aux 5 semaines de congés payés prévus par le Code du travail en France, de telle sorte qu’il pourrait être envisagé que le raisonnement tiré du droit de l’Union Européenne soit limité aux seules congés payés liés aux 4 premières semaines de congés.


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