CAA Versailles 6 mars 2025 n°22VE01437

Dans la présente affaire, un agent de cadre permanent d’un EPIC depuis 1992, exerçait des fonctions syndicales en tant que délégué syndical depuis 2019 et membre de la commission santé, sécurité et conditions de travail du comité social et économique (CSE).

Lors de son entretien d’évaluation en mars 2019, il a tenu des propos déplacés envers sa supérieure hiérarchique directe tout en se mettant à quatre pattes, déclarant notamment : « c’est ce que vous attendez d’un agent de maitrise » puis « si vous étiez un homme, je baisserais mon pantalon et vous donnerai des gants ».

Il a par la suite réitéré ces agissements devant son N+2, baissant son pantalon et ses sous-vêtements en ajoutant : « Voilà la position d’un agent de maîtrise, il ne manque plus que les gants en latex. ».

Face à la gravité des faits, l’employeur engage une procédure disciplinaire et sollicite l’autorisation de l’Inspection du travail pour radier l’agent. Dans un premier temps, l’inspection du travail a refusé cette demande, mais cette décision est annulée par la Ministre du travail, qui a autorisé sa radiation.Cette décision a ensuite été confirmée par le Tribunal administratif de Versailles.

L’agent a interjeté alors appel en considérant notamment que la demande d’explications écrites qui lui avait été adressée avant sa radiation constituait une sanction disciplinaire, dès lors, la radiation intervenue postérieurement ne respecterait pas le principe « non bis in idem ». Il considérait également que les faits reprochés étaient en lien avec son mandat syndical.

La Cour administrative d’appel ne lui donne pas raison et confirme la légalité de la radiation.

Sur le principe non bis in idem, elle juge que la demande d’explications écrites ne constituait pas une sanction disciplinaire. En effet, selon la Cour administrative d’appel, cette demande d’explications écrites – à laquelle l’agent n’est pas tenu de donner suite – ne tend qu’à accroître le principe du contradictoire dans la procédure. Les juges administratifs considèrent alors que cette demande ne fait pas obstacle au prononcé d’une sanction disciplinaire ultérieure.

S’agissant de la gravité des faits reprochés, la Cour estime que les actes de l’agent étaient suffisamment graves pour justifier sa radiation, car « si les fonctions syndicales impliquent une liberté de parole pour l’intéressé, elles supposent également d’adopter un comportement exemplaire. ».

Enfin, la Cour relève l’absence de lien avec son mandat syndical au motif que l’agent n’en apporte pas la preuve.

En conclusion, cet arrêt rappelle que les agents investis d’une fonction représentative sont soumis à une exigence de conduite exemplaire. En cas de manquement, une sanction disciplinaire pourrait être envisagée. Cette solution, qui semble logique, pourrait également être transposable aux salariés investis d’une fonction représentative dans le secteur privé. Elle s’inscrit d’ailleurs dans la continuité de la jurisprudence rendue par la Cour de cassation, qui considère de longue date qu’un salarié peut exprimer son désaccord et émettre des critiques, sous réserve qu’elles soient mesurées et ne s’accompagnent pas de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs (Cass. soc., 25 janv. 2000, no 97-45.044, Cass. soc., 3 mai 2011, no 10-14.104, Cass. soc., 14 juin 2005, n° 02-47.455, Cass. soc., 20 mars 2024, no 22-17.859).


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