CA Paris, 6 mars 2025, n° 24/02319

La procédure de démission présumée instituée par la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022, permet de déduire une démission d’un abandon de poste injustifié, malgré mise en demeure de l’employeur (C. trav., art. L. 1237-1-1).

Cette procédure doit être maniée avec précaution, tant les zones d’incertitudes sont nombreuses. La Cour d’appel de Paris, dans une décision du 6 mars 2025, confirme la vigilance dont il convient de faire preuve en cas de recours à la « présomption de démission ».

Dans cette espèce, le salarié d’une entreprise titulaire par ailleurs d’un mandat de conseiller du salarié, avait été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement. En raison du mandat de conseiller du salarié, l’employeur devait solliciter l’autorisation de l’inspection du travail afin de procéder à son licenciement, autorisation qui lui a été refusée.  

Le salarié a cessé de se présenter à son poste de travail, malgré la levée de la mise à pied conservatoire qui lui avait été notifiée. En conséquence, son employeur décidait de lui appliquer la procédure de démission présumée, en suivant scrupuleusement les obligations édictées par les textes :

  • Une mise en demeure était adressée au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception (C. trav., art. L. 1237-1-1)
  • Ce courrier invitait le salarié à reprendre son poste ou à justifier son absence dans le délai de 15 jours à compter de sa première présentation (C. trav., art. R. 1237-13).

Le salarié n’ayant pas repris son poste, il a été présumé démissionnaire. Contestant le bien-fondé de la rupture de son contrat de travail, il a saisi le conseil de prud’hommes selon la procédure accélérée prévue par les textes, lequel a accédé en grande partie à ses demandes. L’employeur a donc relevé appel de cette décision devant la Cour d’appel de Paris.

Pour la Cour d’appel de Paris :

  • Certes, les motifs avancés par le salarié ne caractérisaient pas des motifs légitimes au sens de l’article R. 1237-13 en ce qu’ils ne permettaient pas de justifier son absence et la non reprise de son poste ;
  • Pour autant, et même si elle reconnaît que le Code du travail ne prévoit aucune disposition spécifique de demande d’autorisation de rupture pour procéder à la démission présumée d’un salarié protégé, la Cour d’appel de Paris pose une distinction entre la rupture unilatérale résultant de la seule volonté du salarié (la démission « classique ») laquelle ne nécessite pas l’autorisation de l’inspection du travail ; et la présomption légale de démission, laquelle fait intervenir l’employeur dans la rupture et qui à ce titre, nécessiterait une autorisation de l’inspection du travail.

En conséquence, la Cour d’appel de Paris retient que la rupture du contrat de travail a été prononcée en violation du statut protecteur, puisque l’inspection du travail n’avait pas été sollicitée, et encourt à ce titre la nullité. Cette solution, qui fera certainement l’objet d’un pourvoi devant la Cour de cassation, réduit l’intérêt de recourir à cette procédure concernant les salariés protégés.


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