En l’espèce, un salarié avait demandé l’organisation d’élections professionnelles. Moins d’un mois plus tard, il avait été convoqué à un entretien préalable à un licenciement avec mise à pied conservatoire, suite auquel il avait été licencié pour faute grave.
Invoquant l’existence d’une discrimination syndicale et contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud’homale aux fins notamment d’annulation du licenciement, de réintégration et de paiement de rappels de salaire et de diverses indemnités. La Cour d’appel a retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, mais que la nullité devait être écartée dès lors que le salarié ne faisait état d’aucun élément de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination syndicale.
En effet, en principe, en matière de discrimination, il appartient tout d’abord au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. Ce n’est qu’au vu de ces éléments qu’il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Cependant, suite à un pourvoi formé par le salarié, la Cour de cassation invalide la position retenue par les juges du fond et casse l’arrêt d’appel. Elle affirme en effet que « lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l’employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d’organiser des élections professionnelles au sein de l’entreprise ».
Cette solution est conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour en matière de charge de la preuve lorsque l’existence d’une mesure de rétorsion est invoquée. En effet, celle-ci juge de la même manière « qu’ayant retenu que le licenciement pour insuffisance professionnelle était dépourvu de cause réelle et sérieuse et constaté qu’il faisait suite au dépôt par le salarié d’une requête devant la juridiction prud’homale tendant à voir reconnaître une situation d’inégalité de traitement ou de discrimination », une Cour d’appel pouvait en déduire, « sans méconnaître les règles de preuve, qu’il appartenait à l’employeur d’établir que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l’exercice, par le salarié, de son droit d’agir en justice » (Cass. Soc., 5 déc. 2018, n°17-17.687). A l’inverse, « lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une action en justice introduite pour faire valoir ses droits » (Cass. Soc., 9 oct. 2019, n°17-24.773).