Cliquer ici pour lire l’intégralité de la décision n° 2021-947 QPC du 19 novembre 2021

 

Le Conseil constitutionnel a jugé non conforme à la norme suprême l’article L. 2314-18 du Code du travail en ce que les dispositions qu’il prévoit, telles qu’interprétées par la Cour de cassation, privent les salariés susceptibles d’être assimilés à l’employeur de la qualité d’électeur aux élections professionnelles, donc de toute représentation au comité social et économique.

La Cour de cassation juge en effet de façon constante que certains salariés membres de l’encadrement et assimilés à l’employeur n’ont pas la qualité d’électeurs et ne participent donc pas au scrutin lié à la mise en place du CSE.

Une atteinte manifeste au principe de participation, qui conduit le législateur à devoir intervenir d’ici au 31 octobre 2022 pour encadrer plus précisément les conditions d’électorat et permettre à ces salariés de participer au scrutin en qualité d’électeurs.

Construction prétorienne privant du droit de vote certains salariés

Rappel : « Sont électeurs les salariés des deux sexes, âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relatives à leurs droits civiques »  article L. 2314-18 du Code du travail

Cet article sert de base à la Cour de cassation qui a décidé d’exclure du corps électoral deux catégories de salariés assimilés au chef d’entreprise :

  • ceux qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise (Cass. soc., 6 mars 2001, nº 99-60.553 PBRI) ;
  • ceux qui représentent effectivement le chef d’entreprise devant les institutions représentatives du personnel (Cass. soc., 12 juillet 2006, nº 05-60.300 PB ; v. le dossier pratique -IRP, élect.- nº 103/2021 du 7 juin 2021).
  • Atteinte au principe de participation

Dans sa décision du 19 novembre, le Conseil constitutionnel rappelle en premier lieu les termes du huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, consacrant le principe de participation des travailleurs selon lequel « Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

À la lumière de ce principe, il estime que les dispositions de l’article L. 2314-18 telles qu’interprétées par la Cour de cassation, « en privant des salariés de toute possibilité de participer en qualité d’électeur à l’élection du comité social et économique, au seul motif qu’ils disposent d’une telle délégation ou d’un tel pouvoir de représentation (…) portent une atteinte manifestement disproportionnée au principe de participation des travailleurs ».

Le Conseil constitutionnel conclut, dès lors, que l’article L. 2314-18 du Code du travail est contraire à la Constitution.

  • Effet différé et abrogation prolongée au 31 octobre

L’abrogation de l’article L. 2314-18 déclaré inconstitutionnel n’interviendra, selon la décision, qu’au 31 octobre 2022, le temps pour législateur de procéder aux clarifications nécessaires. « Les mesures prises avant cette date en application de cet article ne peuvent donc être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité ».

En effet, les Sages ont retenu que « l’abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles aurait pour effet de supprimer toute condition pour être électeur aux élections professionnelles » et qu’elle entraînerait ainsi « des conséquences manifestement excessives ».

 


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