Cass. soc. 5 février 2025 n° 22-24.000 FS-B, Sté Arianegroup c/ C. 

Les transferts d’entreprises ont souvent pour effet de rassembler des salariés issus d’entités différentes et dotées de statuts collectifs distincts au sein d’une même structure juridique, ce qui peut conduire certains salariés à conserver les avantages dont ils bénéficiaient avant le transfert et ainsi soulever des interrogations au regard du principe d’égalité de traitement.

Dans la présente affaire, en date du 1er mai 2012, une société a été absorbée par une autre. Cette fusion-absorption a entraîné, en application de l’article L. 2261-14, la mise en cause de l’application des conventions et accords collectifs de l’entreprise absorbée, parmi lesquels un accord d’entreprise du 22 février 1982 relatif à l’indemnisation des frais de transport. Cet accord prévoyait notamment une indemnité kilométrique pour le personnel dont les horaires de début ou de fin de poste d’équipe ne leur permettent pas d’utiliser les transports en commun.

Par la suite, un accord à durée indéterminée a été conclu le 27 juin 2012, prévoyant le maintien des statuts collectifs antérieurs dans chacune des entités, sans « cumul ni simultanéité » des dispositions conventionnelles entre elles. Un nouvel accord à durée déterminée a été signé le 10 juin 2013 afin de proroger la période d’application des accords mis en cause.

Finalement, un accord de substitution à durée indéterminée est conclu le 20 novembre 2013 avec effet au 1er janvier 2014 et prévoit le maintien de l’indemnité kilométrique applicable dans la société absorbée, exclusivement pour les salariés appartenant à cette entité à la date d’entrée en vigueur dudit accord et pour ceux ayant bénéficié d’une telle indemnisation antérieurement.

Un salarié engagé par la société absorbante avant la fusion, est muté sur le site de la société absorbée à compter du 1er mars 2014 mais ne bénéficie pas du remboursement de ses frais de transports. Il saisit alors la juridiction prud’homale, s’estimant victime d’une inégalité de traitement. Débouté en première instance, il décide alors d’interjeter appel et parvient à obtenir la condamnation de son employeur au paiement d’une somme au titre du remboursement des frais de transport, les juges du fond estimant que l’employeur ne justifie pas l’inégalité de traitement par une raison objective et pertinente.

La société forme un pourvoi en cassation, en considérant que la différence de traitement était justifiée par le maintien d’un avantage acquis à la suite de la mise en cause d’un accord collectif.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt attaqué, en rappelant d’abord que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise, opérées par un accord de substitution négocié et signé par les organisations syndicales représentatives, sont présumées justifiées, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.

Elle précise ensuite que la différence de traitement résultant du maintien de l’indemnisation des frais de transport au profit des seuls anciens salariés du site de la société absorbée « n’était pas étrangère à toute considération de nature professionnelle ».


Pour aller plus loin

Vous souhaitez recevoir nos newsletters, informations et actualités ?

Inscrivez-vous ici