Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 juin 2024, 23-10.783, Publié au bulletin

Selon l’article L1243-11 du Code du travail, lorsque la relation contractuelle de travail se poursuit par un contrat à durée indéterminée à la suite d’un ou de plusieurs contrats de travail à durée déterminée, la durée du ou de ces contrats est déduite de la période d’essai éventuellement prévue dans le contrat de travail à durée indéterminée.

La Cour de cassation vient préciser, dans son arrêt du 19 juin 2024, qu’un intervalle d’un mois entre deux contrats n’empêche pas qu’ils fassent partie de la même relation contractuelle de travail et que leur durée soit déduite de la durée de la période d’essai du CDI.

L’entreprise a notifié à la salariée la rupture de sa période d’essai le 15 septembre 2017 à effet au 18 septembre 2017.

La salariée a saisi le conseil des prud’hommes de Marseille en demandant notamment la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Le conseil a fait droit aux demandes de la salariée et l’employeur a interjeté appel. La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a infirmé le jugement et a débouté la salariée de l’ensemble de ses demandes, au motif que le deuxième et le troisième CDD étaient séparés par une période d’un mois. La cour retient que cette discontinuité empêche de caractériser une chaîne de contrats pour la totalité des CDD conclus par la salariée. Pour la cour, ne formait ainsi une chaîne de contrat que le CDD conclu pour la période du 1er au 30 août 2017 et le contrat à durée indéterminée conclu le 4 septembre 2017. Il en résultait pour la cour que seul le dernier contrat de travail à durée déterminée du 1er au 30 août 2017 devait donc être déduit de la période d’essai. Selon la cour d’appel, c’est donc à bon droit que l’employeur a rompu la période d’essai de la salariée, celle-ci n’étant pas expirée à la date de la notification de la rupture, malgré la déduction de la période correspondant au dernier contrat de travail à durée déterminée conclu.

La salariée a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt d’appel, faisant valoir que la brève interruption du mois de juillet 2017 intervenue pendant la période légale de prise du congé principal, n’empêchait pas de caractériser l’existence d’une relation de travail continue depuis le premier contrat de travail à durée déterminée et que l’ensemble des contrats de travail devaient être considérés dans leur ensemble.

La Cour de cassation accueille les demandes de la salariée et casse la décision de la cour d’appel.

Elle retient que la salariée avait « exercé à cette occasion en qualité d’infirmière dans différents services de soins sans aucune discontinuité fonctionnelle, ce dont il résultait que la même relation de travail s’était poursuivie avec l’employeur depuis le 18 mai 2017 et qu’ainsi la durée des trois contrats de travail à durée déterminée devait être déduite de la période d’essai ».

Il n’est pas nouveau que les juges affirment que la durée de l’ensemble des CDD successifs préalablement conclus entre les parties doit être déduite de la période d’essai prévue dans le nouveau CDI (Cass. Soc., 9 octobre 2013, n°12-21.113).

La Cour précise désormais qu’un mois d’interruption entre des CDD n’empêche pas de considérer qu’il y a une continuité dans la relation de travail. L’employeur a l’obligation de soustraire à la durée de la période d’essai du CDI la durée de l’ensemble des CDD de la relation de travail. Les juges de la Haute Cour soulignent cependant que, pour que l’intervalle entre les contrats soit indifférent, cette relation de travail doit avoir eu lieu sans aucune discontinuité fonctionnelle. Cela était bien le cas en l’espèce, puisque le nouvel emploi n’exigeait de la salariée que des qualités et des compétences au moins similaires à celles requises par les fonctions précédemment occupées lors de ses CDD.


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