Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 2024, Pourvoi nº 23-13.332

Dans cette affaire, un salarié exerçait plusieurs mandats. En dernier lieu, il avait été désigné délégué syndical.. En cette qualité, il bénéficiait de la protection issue de l’article L.2411-1 et suivants du Code du travail.

Une mise à pied disciplinaire de cinq jours avait été notifié à ce salarié protégé, ce qui a amené ce dernier à saisir la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir son annulation, ainsi que la condamnation de la société à lui verser diverses sommes.

A la suite d’un arrêt de première instance, ses demandes ont été accueillies en appel. Pour annuler cette sanction, la cour d’appel a considéré que dans la mesure où aucune modification du contrat de travail et des conditions de travail ne peut être imposée à un salarié protégé, il appartenait à l’employeur de prévenir le salarié de la possibilité de refuser sa mise à pied disciplinaire. Selon les juges d’appel, cette sanction entraînant une modification de sa rémunération et, a fortiori, de sa durée de travail sur la même période.

L’employeur a donc formé un pourvoi en cassation. Il reprochait à l’arrêt d’appel d’annuler la mise à pied disciplinaire prononcée à l’encontre du salarié, et de le condamner en conséquence à lui verser certaines sommes à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents. Au moyen de son pourvoi, l’employeur avançait le fait que la sanction disciplinaire de mise à pied n’emportait aucune modification du contrat de travail, ni même de changement des conditions de travail : celle-ci a seulement pour effet de suspendre provisoirement les effets du contrat de travail. Dès lors, en annulant  la mise à pied disciplinaire notifiée au salarié investi d’un mandat de représentation du personnel, après avoir retenu que celle-ci emportait une modification son contrat de travail, et que l’employeur aurait donc dû l’informer de son droit de s’y opposer, la cour d’appel aurait violé les articles L. 1331-1L. 1332-2 et L. 2411-1 du code du travail.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel, au visa de l’article L.2411-1 du Code du travail. Elle considère que dans la mesure où une telle sanction n’a pas vocation à modifier le contrat de travail du salarié, ni à changer ses conditions de travail, il n’est alors pas nécessaire de recueillir l’accord préalable du salarié protégé.

Par cette décision, la Cour de cassation semble revenir sur une position désormais ancienne (Cass. soc., 23 juin 1999, n°97-41.121). Elle vient surtout conforter la jurisprudence de la Cour d’appel de Paris du 11 janvier 2022 (n°19/04408) qui considère que « la détention d’un mandat ne prive pas l’employeur de son pouvoir disciplinaire et que les représentants du personnel ne disposent donc pas d’une immunité, l’employeur étant à même de prononcer toute sanction allant de l’avertissement, au blâme et à la mise à pied à l’exception de celle entraînant une modification du contrat de travail ». Désormais, il convient donc de considérer avec certitude qu’une mise à pied disciplinaire, ne modifiant pas en elle-même un contrat de travail, peut être notifié à un salarié protégé, sans son accord préalable.


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