CAA de Nantes, 6 mai 2025, n°s25NT00451, 25NT00507, 25NT00708
En principe, l’article L. 1233-5 du Code du travail prévoit que lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité social et économique. L’ordre dans lequel le Code du travail énumère les critères ne lie pas l’employeur. Il peut par ailleurs être opportun de pondérer chacun d’eux selon l’importance que l’on souhaite lui attribuer.
Dans ces requêtes, les sociétés concernées ont été placées en redressement judiciaire par des jugements du tribunal de commerce. La liquidation des sociétés avec cession partielle d’actifs a été prononcée par ce même tribunal. L’échec des négociations collectives menées a conduit à l’élaboration d’un document unilatéral qui prévoit le licenciement des salariés non repris sur les différents sites ainsi que des mesures d’accompagnement social. Le PSE a été homologué.
Le tribunal administratif de Caen a annulé cette décision par un jugement du 26 décembre 2024, au motif que les éléments d’appréciation du critère d’ordre relatif aux qualités professionnelles, prévu par le code du travail, ont été définis par l’employeur dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif lié à leur affectation sur un emploi dont la suppression est recherchée, ceci afin de favoriser la reprise partielle des entreprises concernées.
La Cour juge pour sa part que, si certains des éléments retenus pour apprécier les qualités professionnelles ont pu permettre de prendre en compte des compétences qui paraissent nécessaires aux besoins des repreneurs, cette circonstance ne peut, à elle seule, caractériser une volonté de désigner des salariés en raison de leur affectation à un emploi ou dans un service identifié comme supprimé.
De plus, les quatre critères légaux utilisés pour fixer l’ordre des licenciements ont été appliqués et pondérés, comme le permet la loi, et le critère d’appréciation des qualités professionnelles n’a pas revêtu un caractère prépondérant. Ceci conduit la Cour à infirmer le motif d’annulation retenu par les premiers juges.
La Cour de cassation avait de son côté déjà pu juger que la pondération d’un critère d’ordre, rendue possible par le Code du travail, ne doit pas avoir pour effet d’annihiler les effets d’autres critères pris en compte (Cass. Soc., 8 nov. 2023, n°22-19.205). Cette jurisprudence administrative s’inscrit alors dans la lignée de la jurisprudence judiciaire.