Cour de cassation, Chambre sociale, 8 Janvier 2025 – n° 23-15.410
Dans cette affaire, un salarié, licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement à l’âge de 63 ans, a perçu une indemnité conventionnelle de licenciement fixée par la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 27 avril 1973. En son article 29, cette dernière minore de manière progressive l’indemnité conventionnelle de licenciement – sans que cette minoration ne puisse aboutir à porter l’indemnité à un montant inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement – de telle sorte qu’elle est réduite :
- de 5% pour le salarié âgé de 61 ans
- de 10% pour celui ayant atteint l’âge de 62 ans
- de 20% pour l’âge de 63 ans
- de 40% si le salarié est âge de 64 ans.
Ces principes ont été repris dans le cadre de la Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022 (article 75.3.3).
Débouté de ses demandes tendant au paiement de reliquat d’indemnité de licenciement en raison du caractère, selon lui, discriminatoire de ce mécanisme de minoration, le salarié a formé un pourvoi en cassation. Le salarié fait grief à la cour d’appel, pour écarter le caractère discriminatoire de ce mécanisme, de retenir que celui-ci était légitime, c’est-à-dire objectivement et raisonnablement justifiés par un but légitime, à savoir qu’elle avait « vocation à inciter le départ des salariés ayant atteint l’âge de la retraite afin de favoriser le partage du travail entre les générations et l’insertion professionnelle des jeunes travailleurs ». La cour ajoute que ces dispositions sont d’autant plus appropriées que les salariés concernés bénéficient d’une couverture économique suffisante au regard de la finalité en cause, et que la minoration n’est pas inappropriée pour atteindre l’objectif visé.
Après avoir rappelé l’article L. 1133-2 du Code du travail selon lequel les différences de traitement entre salariés fondées sur l’âge sont autorisées à condition d’être objectivement et raisonnablement justifiées par un objectif légitime, la Cour de cassation, reprenant une solution identifiée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), considère que ce mode de calcul ne constitue pas une différence de traitement fondée de manière discriminatoire sur l’âge.
En effet, par un arrêt Baxter du 6 décembre 2012, la CJUE a jugé que le montant d’une indemnité de rupture prévue dans un plan social pouvait varier selon l’âge des salariés, et ce dans un sens défavorable aux plus âgés, du fait du moindre préjudice subi par les salariés licenciés à un âge très proche de celui de la retraite.
Au surplus, la Haute Juridiction relève que cette minoration litigieuse est le fruit d’un accord négocié entre les partenaires sociaux et les représentants des employeurs, ce qui leur a permis de définir un équilibre entre leurs intérêts respectifs, tout en laissant à chacune des parties la possibilité de dénoncer l’accord.
Reprenant les arguments de la Cour d’appel, au regard de l’âge de départ à la retraite à taux plein au moment des faits, et tenant compte de liberté des partenaires sociaux dans la négociation de cet accord, la Cour de cassation retient que ce mécanisme poursuit un objectif légitime.
Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence constante de la Cour de cassation concernant les différences de traitement fondées sur l’âge. La Cour veille depuis déjà plusieurs années à ce que de telles différences soient objectivement et raisonnablement justifiées par un objectif légitime, tel que :
- la politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle (Cass. Soc. 16 février 2011 n°09-72.061 ; Cass soc 26 novembre 2013 n°12-24.690).
- ou encore, la protection de la santé des salariés (Cass. soc., 14 sept. 2017, n° 15-17.714 ; Cass. soc., 6 mars 2024, n° 22-18.100).