Cour de cassation, Chambre Sociale, 6 novembre 2024, n°23-17.699, 23-17.700, 23-17.701
Aux termes de l’article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Dans les relations entre employeurs et salariés, elle peut être consécutive à une rupture du contrat de travail. Dans un arrêt du 6 novembre 2024, la Cour de cassation s’est prononcée sur la recevabilité d’une demande de réparation par une salariée du préjudice intervenu ultérieurement à la conclusion d’une transaction.
En l’espèce, trois salariés concluent une transaction avec leur employeur postérieurement à la rupture de leurs contrats de travail, respectivement les 20 janvier 2009, 9 novembre 2009 et 8 juillet 2016. Le 25 octobre 2016, par arrêté publié le 1er novembre 2016, l’établissement de la société dans lequel travaillaient ces salariés est inscrit sur la liste des établissements ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) pour la période de 1964 à 1996.
Les salariés saisissent le conseil de prud’hommes en 2017 afin de faire juger qu’ils ont été exposés à des fibres d’amiante pendant l’exécution de leur contrat de travail dans des conditions constitutives d’un manquement à l’obligation contractuelle de sécurité de résultat, et de voir condamner leur employeur à leur verser une certaine somme en réparation du préjudice d’anxiété. Le conseil des prud’hommes, puis la cour d’appel déclarent les demandes des salariés irrecevables.
La cour d’appel constate que le protocole transactionnel du 20 janvier 2009 est consécutif à la rupture du contrat de travail, et prévoit dans des termes généraux, que les salariés renoncent à toute instance ou action née ou à naître au titre de l’exécution ou de la rupture du contrat de travail. Les juges du fond confirment donc qu’en raison de l’autorité de la chose jugée attachée à chacune de ces transactions, les demandes des salariés sont irrecevables.
Les salariés forment un pourvoi en cassation en soutenant que les parties ne peuvent être réputées avoir renoncé à un droit qui n’existait pas à la date de la signature de la transaction, et que l’inscription de l’établissement sur la liste ouvrant droit à l’allocation, étant postérieure à la signature du protocole, les demandes de réparation de son préjudice sont recevables.
La Cour de cassation rejette les pourvois : la demande indemnitaire formée à l’encontre de l’employeur résultant de l’inscription de l’établissement sur ladite liste intervenue postérieurement à la transaction rédigée en termes généraux, n’est pas recevable. Ayant renoncé de manière générale à toute instance et action, les salariés ne peuvent donc pas ultérieurement réclamer la réparation du préjudice d’anxiété né de la publication d’un arrêté postérieure à la signature de l’accord.
Par cette décision, les Hauts juges confirment une position antérieure selon laquelle un salarié ayant conclu une transaction formulée dans des termes généraux ne peut demander l’indemnisation d’un préjudice d’anxiété, y compris lorsque l’inscription de l’établissement sur la liste ouvrant droit à l’allocation est postérieure à la signature de la transaction (Cass. Soc., 21 février 2017, pourvoi n° 15-28.720 ; 6 octobre 2017, n°16-23.891). Cette solution réitère l’intérêt des solutions transactionnelles, qui font obstacles à l’engagement de nouvelles actions ultérieures.