Après plusieurs réunions de concertation, les partenaires sociaux ont abouti à la conclusion d’un accord national interprofessionnel (ANI) relatif à l’emploi des salariés expérimentés, ou « seniors », le 14 novembre dernier.
Cet ANI ambitionne la mise en place de plusieurs dispositifs afin de protéger l’emploi de ces salariés.
Les dispositifs prévus par cet accord, qui ne seront pour la plupart applicables qu’après le vote d’une loi de transposition, ont pour objectif de favoriser le recrutement et le maintien des salariés « seniors » dans leur emploi.
- Instauration d’une obligation triennale de négocier sur l’emploi des seniors dans les entreprises de plus de 300 salariés
Aux termes de l’ANI, trois thèmes feraient partie du socle de négociation obligatoire :
- Le recrutement des salariés expérimentés
- Le maintien dans l’emploi et l’aménagement des fins de carrière
- La transmission des savoirs et des compétences des salariés expérimentés
En sus, l’ANI prévoit 7 thèmes de négociation facultatifs (développement des compétences et accès à la formation, impacts des transformations technologiques et environnementales sur les métiers, pratiques managériales mobilisables, modalités d’écoute des salariés concernant l’exercice de leurs missions, politiques en matière de santé au travail et de prévention des risques professionnels, organisation et des conditions de travail, relations sociales).
- Création d’un contrat de valorisation de l’expérience
Créé pour une durée de cinq ans et à titre expérimental, le contrat de valorisation de l’expérience est ouvert aux demandeurs d’emploi de plus de 60 ans et qui ne sont plus inscrits à France travail.
Ce contrat, conclu pour une durée indéterminée, ne se verrait pas appliquer les dispositions relatives à la mise à la retraite, qui interviendrait automatiquement dès que le salarié atteint l’âge de départ et remplit les conditions de liquidation à taux plein.
En complément, l’employeur serait exonéré du paiement de la contribution patronale de 30 %, assise sur le montant de l’indemnité de mise à la retraite.
Au surplus, la mise en place de ce dispositif serait accompagnée de la suppression du « CDD senior ».
- Cumul des allocations de retour à l’emploi (ARE) et de la rémunération
Si un salarié « senior » conclut un contrat de travail résultant à une perte de rémunération de plus de 30 % par rapport à celle perçue dans le cadre de son précédent emploi, celui-ci peut cumuler sa rémunération avec des ARE, versées par France travail.
Ce cumul ne pourrait permettre au salarié de percevoir un montant total excédant celui de son salaire de référence ayant servi au calcul de ses droits à chômage.
- La réduction des cotisations dues par l’employeur au titre de l’assurance chômage
Cette mesure consisterait en une réduction progressive des cotisations dues par l’employeur à raison d’un point par an à partir des 60 ans du salarié.
En contrepartie, l’employeur s’engage à conserver le salarié dans son poste jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge légal de départ à la retraite et des conditions de liquidation à taux plein, étant précisé que la méconnaissance de cette obligation conduirait l’employeur à devoir rembourser les cotisations ainsi économisées (sauf faute grave, lourde ou motif économique).
- L’accompagnement des salariés en amont de leur départ à la retraite
L’ANI prévoit des dispositifs visant à accompagner le départ à la retraite des salariés : renforcement de l’entretien de mi-carrière et mise en place d’un entretien dans les deux années qui précèdent les 60 ans, élargissement de l’accès à la retraite progressive, etc.
Plus précisément, la retraite progressive devient accessible dès l’âge de 60 ans (contre 62 ans initialement), alors que l’âge de la retraite est progressivement relevé jusqu’à 64 ans du fait de la réforme du 1er septembre 2023.
En outre, l’ANI, sans faire de la retraite progressive un droit opposable, fait obligation à l’employeur de motiver par écrit son refus. L’employeur conserve dès lors le droit de refuser sa mise en œuvre par un salarié qui y serait pourtant éligible, mais en étant contraint par cette exigence de motivation.
Il apporte une intéressante précision sur les motifs qui pourraient être invoqués par un employeur pour justifier le refus du passage à temps partiel d’un salarié du fait de « son incompatibilité avec l’activité économique de l’entreprise », en visant notamment l’impact du passage à temps partiel sur la continuité d’activité de l’entreprise ou du service concerné et des tensions de recrutement objectives sur le poste concerné.
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La loi de transposition devrait intervenir dans le courant de l’année 2025, étant au demeurant précisé que l’ANI prévoit la mise en place d’un comité de suivi chargé de veiller à son intégration fidèle dans le socle législatif.