SOCIAL | Contrat de travail | Hygiène – Sécurité – Conditions de travail
Il résulte des articles 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 9 du code civil, et L. 4121-1, L. 4121-2, L. 4624-3 et L. 4624-6 du code du travail, d’une part que l’usage fait par le salarié de son domicile relève de sa vie privée et qu’il est en droit d’en refuser l’accès, d’autre part que, tenu de prendre en compte les avis, les indications ou propositions émises par le médecin du travail, l’employeur qui n’a pas exercé le recours prévu par l’article L. 4624-7 du code du travail ne peut refuser la mise en place d’un télétravail préconisé par le médecin du travail au titre d’un aménagement du poste au seul motif que le salarié a refusé une visite de son domicile par l’employeur. Doit être censuré l’arrêt qui retient l’absence de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, alors qu’il résultait de ses constatations que celui-ci avait refusé la mise en place du télétravail préconisé par le médecin du travail au seul motif que la salariée s’était opposée à la visite de son domicile.
Soc. 13 nov. 2025, FP-B, n° 24-14.322
Un employeur est-il fondé à refuser une mesure de télétravail recommandée par le médecin du travail au motif que la salariée concernée lui refuse, au nom du respect de sa vie privée, l’accès à son domicile qu’il souhaite au préalable visiter afin de s’assurer que les lieux respectent bien les règles de sécurité et les conditions de travail idoines ?
Dans l’arrêt commenté du 13 novembre 2025, la chambre sociale a décidé que tel n’était pas le cas en proposant, selon nous, une articulation équilibrée entre l’obligation de sécurité de l’employeur et le droit au respect de la vie privée de tout salarié, dans le sillage des conclusions éclairantes émises par Mme Wurtz, première avocate générale.
Les faits sont simples : une salariée de la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail du Languedoc Roussillon fait l’objet de plusieurs avis rendus par le médecin du travail, le dernier en date concluant à un aménagement de poste associé notamment à deux jours de télétravail à domicile.
Pour considérer qu’il ne pouvait être fait grief à l’employeur, au cas d’espèce, de ne pas avoir mis en œuvre la préconisation du médecin du travail, les juges du fond relèvent que l’employeur :
- avait bien recherché la possibilité d’une mise en place du télétravail sur deux jours par semaine (ou la mise en place d’un tiers lieu) ;
- qu’il avait pris en considération les préconisations du médecin et toujours indiqué les motifs qui ne permettaient pas d’y donner suite ;
- que la mise en place du télétravail n’avait pu se faire initialement en raison du refus de la salariée de laisser visiter son domicile pour s’assurer qu’il était conforme et respectait les règles de sécurité et les conditions de travail ;
- que si d’autres salariées avaient pu bénéficier de mesures de télétravail individualisées, elles avaient quant à elles accepté la visite de leur domicile, laquelle avait permis d’aborder les différents aspects de la mise en place du télétravail, impact familial, médico-social, professionnel et technique ;
- que s’il est produit par la salariée un courrier du 31 août 2020 de la société Bureau Veritas relatif au diagnostic de conformité de l’aménagement du poste en télétravail, il n’est pas fait état de la visite à domicile dans les conditions de la candidature au télétravail.
Ils ajoutent enfin que la salariée ne produisait aucun de ses arrêts de travail, ni aucun certificat médical, de sorte que la pathologie dont celle-ci était atteinte ne pouvait être identifiée et qu’il ne pouvait être distingué en quoi l’employeur manquait à son obligation d’assurer sa sécurité et protéger sa santé physique et mentale.
Dans l’arrêt frappé de pourvoi du 5 mars 2024, la Cour d’appel de Nîmes (confirmant un jugement du Conseil de prud’hommes de Nîmes du 28 sept. 2021) en déduit que l’employeur a bien pris les mesures nécessaires et n’a pas manqué à son obligation de sécurité. Elle déboute en conséquence la salariée de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
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