Cour de cassation, Chambre sociale, 2 octobre 2024, 23-12.844, Publié au bulletin

La Cour de cassation se prononce sur le délai et point de départ de la prescription des différentes actions susceptibles d’être engagées par le salarié relatives à une clause de non-concurrence.

La démission d’un salarié, soumis à une clause de non-concurrence d’une durée de trois ans, a pris effet le 26 février 2015. Le salarié a contesté la régularité des clauses de non-concurrence et de non-sollicitation de clientèle présentes dans son contrat de travail, celles-ci n’ayant par ailleurs pas donné lieu au versement d’une contrepartie financière.

Le salarié a sollicité une conciliation, suspensive des délais de prescription, du 9 septembre 2015 au 9 mars 2016, qui s’est soldée six mois plus tard par un échec. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 26 février 2018, c’est-à-dire 3 ans après la date de rupture de son contrat de travail.

Le salarié a émis plusieurs demandes relatives à sa clause de non-concurrence.

Ses demandes sont jugées prescrites par le conseil des prud’hommes puis la Cour d’appel. Le salarié forme alors un pourvoi en cassation.

  1. Régime prescriptif de la demande en paiement de dommages-intérêts pour la stipulation d’une clause de non-concurrence illicite et pour les dommages-intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence et atteinte à la liberté du travail

Il est rappelé que pour être licite, une clause de non-concurrence doit permettre d’assurer la protection des intérêts de l’entreprise, en limitant, pour une durée déterminée et dans une zone géographique déterminée, la possibilité pour un ancien salarié de reprendre une activité professionnelle auprès d’un concurrent de l’employeur. En contrepartie, le salarié doit se faire attribuer une compensation financière.

La clause ne comportant pas l’ensemble de ces critères de validité peut être annulée.

La Cour de cassation précise, par cet arrêt, qu’une telle demande se rapporte à l’exécution du contrat de travail, laquelle se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit (C. trav. L. 1471-1). Alors même que la clause de non-concurrence est déclenchée du fait de la rupture du contrat de travail, cette demande n’est pas régie par le régime de la prescription des actions relatives à la rupture du contrat de travail, qui limite la prescription à une durée d’un an.

Cependant, la Cour de cassation ajoute que ce délai de deux ans court à compter de la mise en œuvre de la clause, c’est-à-dire à compter de la rupture du contrat de travail.

Ainsi, la Cour de cassation ne retient pas l’argumentation du salarié qui soutenait que son dommage avait perduré pendant toute la durée de mise en œuvre de la clause litigieuse, et qui aurait conduit le point de départ du délai pour agir à être reporté au terme de l’exécution de la clause.

Par ailleurs, le salarié soutenait que le non-paiement de la clause de non-concurrence lui causait un préjudice indemnisable distinct, du fait de l’atteinte illégitime à sa liberté du travail.

Là encore, la Cour de cassation précise sur ce point que cette action est relative à l’exécution du contrat et se prescrit donc par deux ans. Néanmoins, la Cour retient que le point de départ du délai de prescription lié à cette action court à compter de la date à laquelle le salarié « n’était plus tenu de respecter la clause de non-concurrence ».

  1. Régime prescriptif de la demande en paiement de la contrepartie financière liée à la clause de non-concurrence

Par ailleurs, le salarié ne s’étant pas vu verser la contrepartie financière prévue par la clause de non-concurrence, il demandait aux juridictions prud’homales, à titre subsidiaire, de condamner son ancien employeur au versement de cette contrepartie.

La Cour de cassation rappelle que la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence a la nature d’une « indemnité compensatrice de salaire », qui suit dès lors le régime prescriptif des salaires, c’est-à-dire qu’elle se prescrit par trois ans à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action (C. trav. L. 3245-1). Le point de départ du délai pour saisir la juridiction correspond à la date d’exigibilité du salaire correspondant la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise.

En conséquence, la Cour de cassation précise que les sommes dues au titre de la contrepartie financière d’une clause de non-concurrence non-payée peuvent donc être réclamées dans les trois ans suivant chaque échéance mensuelle.


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