Cour de cassation, chambre sociale, 19 mars 2025 n°23-23.029 :

Dans cette affaire, un salarié a été engagé par plusieurs contrats de travail à durée déterminée, sur une période de 16 ans, entre le 2 avril 2002 et le3 avril 2018, date de la rupture du dernier contrat.

Le salarié a sollicité et obtenu la requalification de son CDD en CDI puis a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a demandé à que cette prise d’acte prenne les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les juges du fond ont souverainement considéré que la prise d’acte du contrat de travail du salarié produit les effets d’une démission, et non d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le salarié se pourvoit en cassation. Il fait grief à l’arrêt d’appel de juger ainsi, et de le débouter, a fortiori, de ses demandes de paiement de diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. En effet, le salarié soutenait que le fait d’affecter un salarié titulaire de contrats saisonniers à durée déterminée irréguliers à des tâches non strictement saisonnières et non durables peut être considéré comme un manquement grave de l’employeur justifiant la prise d’acte de la rupture du contrat de travail à ses torts exclusifs. En retenant, après avoir requalifié la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée, que la prise d’acte du salarié produisait les effets d’une démission au motif que la conclusion des contrats de travail à durée déterminée irréguliers ne serait pas d’une gravité suffisante, le salarié ayant persisté pendant plus de seize ans sans y voir aucun inconvénient, le salarié considère que la cour d’appel aurait violé les articles L. 1234-1, L. 1234-9, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail.

Mais la Cour de cassation n’est pas de cet avis. Elle considère que certes, le manquement tenant à la conclusion de contrats de travail irréguliers était établi, mais que ce manquement n’est pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Dès lors, la prise d’acte ne saurait produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En effet, tout manquement de l’employeur ne justifie pas un « auto-licenciement » du salarié. Encore faut-il que le manquement reproché à l’employeur soit suffisamment grave (Cass. soc., 27 sept. 2006, n° 04-46.786).

Comme à l’accoutumée, la Cour de cassation s’en remet ici au pouvoir souverain des juges du fond quant à la caractérisation de la gravité des manquements reprochés à l’employeur. Si la casuistique semble indépassable, il convient néanmoins de rappeler qu’en la matière, c’est à l’employeur que le doute profite et c’est au salarié qu’il appartient d’apporter la preuve de la réalité et de la gravité des griefs qu’il reproche à son employeur (Cass. soc., 28 nov. 2006, n° 05-43.901 ; Cass. soc., 30 mai 2007, n° 05-44.685).


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